Les contes pour enfant du monde

Le dévot et la belette



On raconte qu’un homme pieux vivait retiré dans la contrée de (uráân (Jourjan). Il avait une belle épouse avec laquelle il vivait depuis longtemps sans avoir eu d’enfant ; puis elle tomba enceinte à un âge avancé. La femme fut très contente ainsi que le dévot qui remercia le Créateur et le supplia de lui accorder un garçon ; puis il dit :
- « Réjouis-toi, Ô femme, j’espère que tu enfanteras un garçon qui nous apportera la prospérité et la sérénité. Je vais lui trouver le plus beau nom et lui choisir les meilleurs précepteurs. »
- « Qu’est-ce qui te porte, dit la femme, à parler de choses que tu ignores et qui adviendront peut-être, ou pas ? »
Ensuite la femme enfanta un garçon sain et vigoureux, à la plus grande joie du dévot, son époux.
Lorsque le temps de ses ablutions arriva, la femme dit :
-« Reste près de l’enfant ; je dois faire mes ablutions au bain et je reviens. » Puis elle partit, laissant l’enfant à la garde de son mari.
Mais voilà que l’émissaire du roi vint le convoquer auprès du monarque ; il ne trouva, pour le remplacer auprès de l’enfant, qu’une belette qu’il avait élevée et bien dressée et qu’il affectionnait autant qu’un fils ; il la laissa près du nouveau-né, ferma la porte et partit avec le messager.
Or voici qu’un serpent noir sortit de quelque coin de la maison et s’approcha de l’enfant. La belette lui asséna un coup, puis lui sauta dessus et le déchiqueta au point que son museau était plein de sang.
Rentrant chez lui, le dévot ouvrit la porte ; la belette vint lui apporter la bonne nouvelle et l’accueillir, toute fière d’avoir tué le serpent. A la vue du sang qui entachait la belette, une fureur aveugle fit perdre la tête à l’homme qui imagina que l’animal avait tué son fils. Pris par la rage et la colère, et sans chercher à vérifier, il asséna un grand coup de son bâton sur la tête de la belette et la tua.
Une fois à l’intérieur de la maison, il vit son enfant sain et sauf et, gisant près de lui, le serpent noir déchiqueté. Lorsqu’il comprit
ce qui s’était passé et eut constaté sa mauvaise action par sa précipitation, il se frappa la tête et dit :
- « Cet enfant n’aurait pas dû naître, je n’aurais pas commis ce crime. »
Sa femme rentra et, le trouvant prostré et triste, l’interrogea :
- « Qu’as-tu, mon ami ? »
Il lui narra la bonne action dela belette et la mauvaise récompense qu’il lui avait réservée ; sa femme lui dit :
- « Voilà la sanction de ta précipitation, car tu n’as pas pris le soin de vérifier le fond des choses, et tu as agi avec empressement et irreflexion



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